Au début de l’été, le Premier ministre François Bayrou a annoncé une nouvelle initiative de dialogue avec les Français. Dans une volonté affichée de renforcer la transparence et la participation citoyenne, il a lancé sa propre chaîne YouTube, sur laquelle les internautes peuvent interpeller directement le gouvernement au sujet de son plan d’action 2026.
Dans le même esprit, le gouvernement a choisi de relancer l’application mobile Agora. Cet outil, déjà testé par le passé, permet aux citoyens de poser des questions directement aux ministres. Son fonctionnement repose sur un principe simple : chaque semaine, la question recueillant le plus grand nombre de votes doit obtenir une réponse officielle du gouvernement.
La question de Fabien : un sujet brûlant autour de la résidence alternée
C’est dans ce cadre que Fabien, un utilisateur d’Agora, a soumis une question dans la rubrique Justice. Son interpellation portait sur la Proposition de loi n°819, déposée par la députée Christine Le Nabour, visant à renforcer la reconnaissance de la résidence alternée des enfants en cas de séparation des parents.
Cette question était loin d’être anodine :
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La résidence alternée figurait parmi les promesses de campagne d’Emmanuel Macron en 2017, mais reste lettre morte.
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La proposition actuelle n°819 est en réalité la 6ᵉ proposition de loi déposée en 8 ans sur ce même sujet — aucune n’ayant jamais été soumise au vote à l’Assemblée nationale, ni même débattue dans son entiereté.
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Le retard français est criant : alors que des pays voisins comme la Belgique ou l’Espagne dépassent les 30 % de mise en place de résidence alternée, la France plafonne à 12 %.
Ces arguments ont trouvé un fort écho auprès des internautes. La question de Fabien est rapidement devenue virale, atteignant la première place du classement en moins de 24 heures.
Un silence qui fait polémique
Pourtant, à la surprise générale, le gouvernement a choisi de ne pas répondre à cette interpellation citoyenne, pourtant arrivée en tête des votes. À la place, les ministres ont apporté des réponses à d’autres questions… qui n’avaient recueilli que 3 à 6 votes.
Cette décision a provoqué une vague d’indignation. De nombreux internautes, dénonçant un déni de démocratie participative, ont écrit à l’équipe d’Agora pour exprimer leur colère. Beaucoup y voient une remise en cause du principe même de l’application, censée donner une voix directe aux citoyens.
La réaction du collectif Défendre les enfants
Le collectif Défendre les enfants, à l’initiative de la PPL 819, a rapidement pris la parole. Comprenant le désarroi des militants et des citoyens mobilisés, il a réaffirmé son soutien et invite le gouvernement à répondre dans les plus brefs délais à cette question jugée cruciale pour l’avenir des familles séparées et des enfants concernés.
Pour le collectif, ce silence ne fait que renforcer le sentiment d’un manque de considération politique envers un sujet de société pourtant majeur, qui touche directement des centaines de milliers de familles en France.
Entre innovation démocratique et désillusion citoyenne
Avec YouTube et Agora, François Bayrou avait l’ambition de bâtir un nouveau pont entre gouvernants et gouvernés. Mais l’épisode de la question sur la résidence alternée révèle les limites de cet exercice : comment convaincre les citoyens de participer si les questions les plus votées restent sans réponse ?
Ce paradoxe interroge l’avenir de ces plateformes de participation, censées renforcer la démocratie mais qui, mal utilisées, risquent de nourrir encore davantage la défiance citoyenne.